Comme promis...Le conte

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  • meregrand

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    • Created on Dec 8, 2003 at 8:25 AM
    • #17725
    Bonjour mes zazous,

    Posez vos dossiers, vos stylos, vos soucis...Oubliez que vous êtes grands et laissez s´asseoir, sur vos genoux, les enfants que vous êtes restés au fond de vous et écoutez...


    De belles histoires comme celle ci,nous devrions les entendre plus souvent-pas seulement à NOEL...et peut être deviendrions nous plus raisonnables! Grand merci-






    Il était une fois…

    La bulle de verre.

    Il y a bien longtemps, quand j´étais petite, les vieux, à la veillée racontaient une bien étrange histoire…

    Ils disaient que la nuit de Noël, les anges quittaient les cieux pour exaucer les rêves des enfants tristes.
    Leurs âmes pures volaient à travers la nuit et se posaient, comme un souffle, sur les peines des petits endormis. Alors, sur le visage des bambins où perlaient encore, à travers les paupières fermées, quelques grosses larmes, naissait un sourire qui, dit-on, ravissait les messagers, pour qui, sourire d´innocent est miel.
    Débordant d´amour et de joie, les séraphins, avant de rejoindre les limbes, laissaient en cadeau, bien à l´abri dans le cœur des gamins, le pouvoir de réaliser le plus cher de leurs vœux.

    Sans doute, un soir de Noël, il y a de ça un siècle au moins, l´un d´eux visita t-il le petit Pierre…

    Pierre avait douze ans.
    À cette époque là, mes amis, près de la ligne bleue des Vosges dans cette belle lorraine ensevelie sous la neige, à douze ans, on prenait bon matin le chemin de la soufflerie.
    Notre bambin n´échappait pas à la règle. Il était apprenti souffleur, depuis deux années déjà, à la cristallerie.

    Il adorait voir les maîtres tourner sans relâche leurs cannes de soufflage pour tirer du magma en fusion une forme née du feu et de l´air.
    Près de la bouche brûlante du four, dans un coin de l´atelier il passait ses journées à tailler les outils de bois dont se servaient les plus anciens pour peaufiner les objets issus de leur art, en rêvant qu´un jour, lui aussi, saurait dompter le verre.
    Pour l´heure, jamais les maîtres ne lui auraient permis de souffler. Et pourtant ! Il était sûr qu´il saurait ! L´envie lui brûlait les lèvres.

    Il l´imaginait déjà sa merveille...Il créerait la forme absolue. Il inventerait la beauté parfaite. Il donnerait au monde un chef d´œuvre !
    Il se voyait déjà admiré et congratulé par des foules conquises, en extase devant son vase, sa lampe à huile ou sa pâte de verre.
    En attendant, il soupirait d´impatience, et détestait le temps qui le séparait encore de la gloire.

    Aussi, qu´elle ne fût pas sa surprise, quand, le surlendemain de Noël, son patron qui était aussi un des plus talentueux des artistes de la cristallerie lui tendit sa propre canne et lui dit en souriant :
    « Tiens mon garçon ! Montre moi ce dont tu es capable ». L´enfant, abasourdi, oublia d´un coup son envie et balbutia
    « Mais, Maître guillaume, je ne sais pas quoi faire !
    - Heureusement mon petit ! Ce n´est pas à toi de choisir ce que tu vas faire…c´est le feu et le verre qui décident. S´esclaffa le souffleur.
    - Je ne pourrais jamais tenir les ciseaux et les fers plats maître, mes mains sont trop petites ! » Tenta Pierre pour échapper à son rêve qui, d´un coup, tournait au cauchemar.
    « Je t´aiderai. Aller mon garçon ! Trêve de tergiversations, tu dois le faire ! » Se fâcha Guillaume Chantepin, le maître verrier.
    Terrorisé l´enfant se saisit de la canne, et d´un geste malhabile cueillit une petite boule de verre en fusion, comme il avait vu ses aînés le faire et porta l´outil à sa bouche. À ce moment là, tout lui parut simple…il soufflait, tournait, offrait l´embryon en fusion à flamme et tournait encore, et soufflait de plus belle sous le regard attentif de Guillaume.
    Ainsi, petit à petit, lentement, comme une fleur qui éclot, comme se nourrissant de son souffle, apparut une magnifique bulle de verre. Elle était si fine que sa transparence semblait attirer la lumière qui jouait et explosait en elle semblable à mille éclats de feu.
    Pierre, épuisé, se demandait, subitement paniqué, ce qu´il pouvait bien faire de cette forme là ! Mais rien ne venait à son esprit enfiévré. Au bord du désespoir, il jetait des regards éperdus à son maître.
    Celui-ci, voyant le gamin perdu et épuisé, lui dit :
    « C´est bien petit, arrête-toi là…je crois que l´as ton chef d´œuvre. » Il saisit les gros ciseaux et coupa d´un geste sûr, juste au-dessus de la bulle, tout en recueillant celle-ci dans la paume de sa main gantée.
    L´enfant eut l´impression, à ce moment précis, que sa canne était un cordon ombilical et que l´on venait de le séparer d´une partie de lui-même.
    Guillaume enfourna la bulle de verre afin de la recuire tandis que Pierre, caché dans un coin, pleurait à chaudes larmes, déçu de son échec.

    De longues heures plus tard, Guillaume l´appela.
    Tout penaud, Pierre vit que les maîtres étaient réunis autour de la table où l´on exposait les créations de la journée.
    Il y avait là, le gentil maître Benoît toujours prêt à réconforter les apprentis et qui enseignait avec douceur, maître Arsène le bon vivant, souvent vif mais le cœur sur la main qui n´hésitait jamais à empocher une taloche, pourtant bien souvent méritée, maître Anthelme, l´un des plus anciens mais aussi le plus dur et le plus sournois, le plus envieux et le plus jaloux. Cet homme là avait toujours le fiel à la bouche et ne supportait pas que l´on pense différemment de lui. Si on voulait être de ses amis, il fallait l´encenser. Venait enfin maître Guillaume, qui, comme je vous l´ai dit, était le plus talentueux et le plus juste d´entre eux.
    En traînant les pieds, n´osant pas affronter le regard de ses mentors, le jeune garçon se dirigea vers le cercle qui se brisa à son approche.
    « Aller mon garçon ! Lève les yeux regarde un peu ton travail ». Intima maître Guillaume d´une voix douce.
    L´enfant obéît à contrecœur. Et alors là mes amis ! Il vit sur la table la chose la plus étonnante qui soit ! Guillaume avait posé la boule de verre sur un petit socle recouvert de velours bleu marine et elle apparut alors au gamin comme la bulle la plus fragile et la plus légère qui soit. Pierre retenait son souffle tant il avait l´impression que le moindre filet d´air la ferait s´envoler.
    « Dis nous ce que tu en penses et ce que nous devons en faire, petit. » Demanda le souffleur.
    L´enfant se tortillait mal à l´aise. Pour lui, cette bulle était la création la plus inutile qui soit ! Cela ne servait à rien ! Certes c´était joli, mais lui, il voulait donner aux autres quelques choses de grand, de beau, d´utile et il trouvait insultante la beauté toute simple de cet objet futile. Comment pouvait-il dire cela à son maître ? Les mots ne venaient pas.
    « Ben…heu …Je ne sais pas maître. » Bredouilla t-il tout en pensant qu´il allait se liquéfier de honte, là, sur place… glisser sous la porte et se laisser boire par la boue d´un champ.
    « Hé bien ! Demandons cela aux artistes de cette maison. » Dit guillaume et, se tournant vers ses compagnons, il interrogea maître Benoît.
    « Mon compère, comment trouvez-vous cela ? Que devons nous faire de cette bulle?
    - À dire le vrai, mon ami, je ne peux formuler exactement ce que j´en pense ! Je ne sais pas pourquoi cet enfant a créé cela, mais dès que je regarde cette bulle et ses magnifiques tons irisés de bleu, je retrouve, dans l´instant, l´éclat des yeux de ma mère, le bon dieu garde son âme…et cela me rend heureux. Ne la gardons pas, offrons la à l´orphelinat répondit Benoît la voix tremblante.
    - Et vous maître Arsène ? Continua le verrier.
    - Ha ça ! Mon bon Guillaume, que je sois changé en moine si je le sais ! Je pense un peu comme notre ami Benoît…mais je ne vois pas où il est allé chercher du bleu ! Elle est rose cette bulle ! Aussi rose que ma chère fille, Camille, quand ma chère femme l´a mise au monde ! Aussi rose que ses joues quand je l´ai conduite devant Monsieur le curé pour la marier au Gabriel ! Tiens ! Je sais ce que je trouve moi dans cette bulle… j´y sens le parfum de mon enfant qui me manque tant et cela me donne de la joie ! » Dit maître Arsène le ton bourru et le regard embué. Puis il reprit dans un reniflement sonore :
    « Ne la gardons pas, offrons la à l´hospice des vieux. »
    « Et vous maître Anthelme que voyez-vous dans cet objet ? ». Questionna Guillaume
    « Bah ! Pas grand chose ! Hormis le fait qu´elle ne soit ni bleue ni rose mais grise et noire ! En y réfléchissant bien, elle me rappelle mon frère avec qui je suis en procès pour l´héritage de notre père. Elle est juste bonne à jeter à mon avis, cette bulle, elle est bien plus laide que le plus laid des objets que moi j´ai soufflé ! Elle me met tout simplement en colère cette chose ! Ne la gardons pas, jetons la dans le plus profond des gouffres que nous puissions l´oublier. » Aboya maître Anthelme des graviers dans la voix.
    « Et vous compagnon, que voyez-vous ? » Demanda vivement Arsène à Guillaume pour tenter de faire passer inaperçu la méchanceté des propos de son confrère.
    « Pour moi ce n´est pas plus facile que pour vous mes amis. D´ailleurs, moi je la vois tantôt rouge, tantôt verte, tantôt dorée et argentée ! » Répondit le souffleur l´air dubitatif. Après avoir réfléchi quelques minutes il ajouta.
    « J´y sens ce que vous y sentez Arsène, et j´y retrouve que ce que vous y retrouvez Benoît. J´y vois le regard d´une mère, la beauté d´un enfant, mais j´y entends aussi des éclats de rires, je sens la chaleur d´une flamme quand j´approche ma main. Elle me fait aussi penser à un frère, maître Anthelme, mais vous le savez, je n´en ai point… Et, du coup, elle me donne envie de faire du moindre inconnu qui passe ce frère que je n´ai pas ! Elle me donne envie de partager. Tiens ! je sais maintenant ce que nous allons en faire! dit-il d´un ton joyeux. » Puis, se tournant vers le petit Pierre il rajouta.
    « Si tu es d´accord mon garçon nous allons l´offrir à tout le monde. »
    Pierre avait écouté les propos de ses maîtres partagé entre la joie et l´incrédulité. Il était transporté de bonheur et de fierté. Durant toute la conversation, les yeux rivés sur sa bulle, il avait ressentit tout ce que les autres ressentaient ! Comment cette petite chose qu´il avait crée pouvait-elle avoir autant de puissance ? Il ne savait pas, mais en tout cas, il voulait qu´elle vive ! Il avait envie de sauter au cou de maître Guillaume, aussi répondit-il précipitamment :
    « ho ! oui maître ! Offrons la à tout le monde. »
    Alors, Guillaume, avec un sourire, saisit la boule, enroula un fil doré tout autour de sa surface en prenant garde de laisser le plus de verre possible apparaître, puis se dirigea vers le sapin de Noël qui finissait de perdre ses aiguilles dans un coin de l´atelier et suspendit la bulle de verre à la plus haute des branches.
    Dés qu´elle fut posée, la bulle de verre se balança, doucement, comme bercée par un souffle de vent. Elle emprisonna toutes les couleurs qui l´entouraient, elle vola le bleu de l’acier, elle captura les reflets du feu des forge, puis, d´un coup, fit exploser la vie en une gerbe de lumière.
    C´était féerique, mes amis.
    Jamais homme ne vit spectacle plus beau ! Tous les ouvriers de la soufflerie, attirés par cette magie, se tenaient serrés les uns aux autres, émus, autour du sapin. Ils se sentaient unis dans la beauté. Et sur nombre de visages burinés coulaient de grosses larmes de joie.

    Maître Guillaume passa son bras autour des épaules de Pierre et lui dit avec un bon et grand sourire :
    « Tu vois, mon garçon, tu l´as réussi ton chef d´œuvre! Tu as offert un peu de toi aux autres et ce que tu donnais te paraissait bien peu et bien inutile. Regarde maintenant ! Ne penses-tu pas que la moindre chose offerte avec sincérité et amour est le plus beau des cadeaux ?
    - Ho si ! » Dit le petit garçon heureux.
    « Tu seras un grand maître verrier un jour ! » Conclu Guillaume avec fierté.
    « Merci maître » Répondit le petit garçon, en essuyant ses joues mouillées…

    Et, depuis, à travers le monde, pour la nuit de Noël, on suspend aux branches des sapins de jolies petites boules multicolores. Est-ce pour que cela soit plus joli ? Est-ce pour rendre nos maisons plus agréables ? Ou est-ce uniquement pour retrouver le regard aimant d´une mère, la douceur de notre enfance, la joie sur le visage de nos amis, le bonheur de partager un moment d´amour. Qui sait mes amis ? Qui sait ?
    En tout cas, souvenez-vous du petit Pierre qui offrit un peu de lui au monde…Ne vous demandez pas à quoi sert ce que vous donnez, on ne sait jamais ce que les autres vont en faire et peu importe! Le principal est de donner avec amour et sincérité…

    Que votre Noël soit plein d´amour, de joie, de partage et que le bonheur pousse sur vos arbres !

    Amis, passants, absents...Je vous embrasse

    Aéllo qui raconte
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    Bonjour mes zazous,

    Posez vos dossiers, vos stylos, vos soucis...Oubliez que vous êtes grands et laissez s´asseoir, sur vos genoux, les enfants que vous êtes restés au fond de vous et écoutez...


    De belles histoires comme celle ci,nous devrions les entendre plus souvent-pas seulement à NOEL...et peut être deviendrions nous plus raisonnables! Grand merci-






    Il était une fois…

    La bulle de verre.

    Il y a bien longtemps, quand j´étais petite, les vieux, à la veillée racontaient une bien étrange histoire…

    Ils disaient que la nuit de Noël, les anges quittaient les cieux pour exaucer les rêves des enfants tristes.
    Leurs âmes pures volaient à travers la nuit et se posaient, comme un souffle, sur les peines des petits endormis. Alors, sur le visage des bambins où perlaient encore, à travers les paupières fermées, quelques grosses larmes, naissait un sourire qui, dit-on, ravissait les messagers, pour qui, sourire d´innocent est miel.
    Débordant d´amour et de joie, les séraphins, avant de rejoindre les limbes, laissaient en cadeau, bien à l´abri dans le cœur des gamins, le pouvoir de réaliser le plus cher de leurs vœux.

    Sans doute, un soir de Noël, il y a de ça un siècle au moins, l´un d´eux visita t-il le petit Pierre…

    Pierre avait douze ans.
    À cette époque là, mes amis, près de la ligne bleue des Vosges dans cette belle lorraine ensevelie sous la neige, à douze ans, on prenait bon matin le chemin de la soufflerie.
    Notre bambin n´échappait pas à la règle. Il était apprenti souffleur, depuis deux années déjà, à la cristallerie.

    Il adorait voir les maîtres tourner sans relâche leurs cannes de soufflage pour tirer du magma en fusion une forme née du feu et de l´air.
    Près de la bouche brûlante du four, dans un coin de l´atelier il passait ses journées à tailler les outils de bois dont se servaient les plus anciens pour peaufiner les objets issus de leur art, en rêvant qu´un jour, lui aussi, saurait dompter le verre.
    Pour l´heure, jamais les maîtres ne lui auraient permis de souffler. Et pourtant ! Il était sûr qu´il saurait ! L´envie lui brûlait les lèvres.

    Il l´imaginait déjà sa merveille...Il créerait la forme absolue. Il inventerait la beauté parfaite. Il donnerait au monde un chef d´œuvre !
    Il se voyait déjà admiré et congratulé par des foules conquises, en extase devant son vase, sa lampe à huile ou sa pâte de verre.
    En attendant, il soupirait d´impatience, et détestait le temps qui le séparait encore de la gloire.

    Aussi, qu´elle ne fût pas sa surprise, quand, le surlendemain de Noël, son patron qui était aussi un des plus talentueux des artistes de la cristallerie lui tendit sa propre canne et lui dit en souriant :
    « Tiens mon garçon ! Montre moi ce dont tu es capable ». L´enfant, abasourdi, oublia d´un coup son envie et balbutia
    « Mais, Maître guillaume, je ne sais pas quoi faire !
    - Heureusement mon petit ! Ce n´est pas à toi de choisir ce que tu vas faire…c´est le feu et le verre qui décident. S´esclaffa le souffleur.
    - Je ne pourrais jamais tenir les ciseaux et les fers plats maître, mes mains sont trop petites ! » Tenta Pierre pour échapper à son rêve qui, d´un coup, tournait au cauchemar.
    « Je t´aiderai. Aller mon garçon ! Trêve de tergiversations, tu dois le faire ! » Se fâcha Guillaume Chantepin, le maître verrier.
    Terrorisé l´enfant se saisit de la canne, et d´un geste malhabile cueillit une petite boule de verre en fusion, comme il avait vu ses aînés le faire et porta l´outil à sa bouche. À ce moment là, tout lui parut simple…il soufflait, tournait, offrait l´embryon en fusion à flamme et tournait encore, et soufflait de plus belle sous le regard attentif de Guillaume.
    Ainsi, petit à petit, lentement, comme une fleur qui éclot, comme se nourrissant de son souffle, apparut une magnifique bulle de verre. Elle était si fine que sa transparence semblait attirer la lumière qui jouait et explosait en elle semblable à mille éclats de feu.
    Pierre, épuisé, se demandait, subitement paniqué, ce qu´il pouvait bien faire de cette forme là ! Mais rien ne venait à son esprit enfiévré. Au bord du désespoir, il jetait des regards éperdus à son maître.
    Celui-ci, voyant le gamin perdu et épuisé, lui dit :
    « C´est bien petit, arrête-toi là…je crois que l´as ton chef d´œuvre. » Il saisit les gros ciseaux et coupa d´un geste sûr, juste au-dessus de la bulle, tout en recueillant celle-ci dans la paume de sa main gantée.
    L´enfant eut l´impression, à ce moment précis, que sa canne était un cordon ombilical et que l´on venait de le séparer d´une partie de lui-même.
    Guillaume enfourna la bulle de verre afin de la recuire tandis que Pierre, caché dans un coin, pleurait à chaudes larmes, déçu de son échec.

    De longues heures plus tard, Guillaume l´appela.
    Tout penaud, Pierre vit que les maîtres étaient réunis autour de la table où l´on exposait les créations de la journée.
    Il y avait là, le gentil maître Benoît toujours prêt à réconforter les apprentis et qui enseignait avec douceur, maître Arsène le bon vivant, souvent vif mais le cœur sur la main qui n´hésitait jamais à empocher une taloche, pourtant bien souvent méritée, maître Anthelme, l´un des plus anciens mais aussi le plus dur et le plus sournois, le plus envieux et le plus jaloux. Cet homme là avait toujours le fiel à la bouche et ne supportait pas que l´on pense différemment de lui. Si on voulait être de ses amis, il fallait l´encenser. Venait enfin maître Guillaume, qui, comme je vous l´ai dit, était le plus talentueux et le plus juste d´entre eux.
    En traînant les pieds, n´osant pas affronter le regard de ses mentors, le jeune garçon se dirigea vers le cercle qui se brisa à son approche.
    « Aller mon garçon ! Lève les yeux regarde un peu ton travail ». Intima maître Guillaume d´une voix douce.
    L´enfant obéît à contrecœur. Et alors là mes amis ! Il vit sur la table la chose la plus étonnante qui soit ! Guillaume avait posé la boule de verre sur un petit socle recouvert de velours bleu marine et elle apparut alors au gamin comme la bulle la plus fragile et la plus légère qui soit. Pierre retenait son souffle tant il avait l´impression que le moindre filet d´air la ferait s´envoler.
    « Dis nous ce que tu en penses et ce que nous devons en faire, petit. » Demanda le souffleur.
    L´enfant se tortillait mal à l´aise. Pour lui, cette bulle était la création la plus inutile qui soit ! Cela ne servait à rien ! Certes c´était joli, mais lui, il voulait donner aux autres quelques choses de grand, de beau, d´utile et il trouvait insultante la beauté toute simple de cet objet futile. Comment pouvait-il dire cela à son maître ? Les mots ne venaient pas.
    « Ben…heu …Je ne sais pas maître. » Bredouilla t-il tout en pensant qu´il allait se liquéfier de honte, là, sur place… glisser sous la porte et se laisser boire par la boue d´un champ.
    « Hé bien ! Demandons cela aux artistes de cette maison. » Dit guillaume et, se tournant vers ses compagnons, il interrogea maître Benoît.
    « Mon compère, comment trouvez-vous cela ? Que devons nous faire de cette bulle?
    - À dire le vrai, mon ami, je ne peux formuler exactement ce que j´en pense ! Je ne sais pas pourquoi cet enfant a créé cela, mais dès que je regarde cette bulle et ses magnifiques tons irisés de bleu, je retrouve, dans l´instant, l´éclat des yeux de ma mère, le bon dieu garde son âme…et cela me rend heureux. Ne la gardons pas, offrons la à l´orphelinat répondit Benoît la voix tremblante.
    - Et vous maître Arsène ? Continua le verrier.
    - Ha ça ! Mon bon Guillaume, que je sois changé en moine si je le sais ! Je pense un peu comme notre ami Benoît…mais je ne vois pas où il est allé chercher du bleu ! Elle est rose cette bulle ! Aussi rose que ma chère fille, Camille, quand ma chère femme l´a mise au monde ! Aussi rose que ses joues quand je l´ai conduite devant Monsieur le curé pour la marier au Gabriel ! Tiens ! Je sais ce que je trouve moi dans cette bulle… j´y sens le parfum de mon enfant qui me manque tant et cela me donne de la joie ! » Dit maître Arsène le ton bourru et le regard embué. Puis il reprit dans un reniflement sonore :
    « Ne la gardons pas, offrons la à l´hospice des vieux. »
    « Et vous maître Anthelme que voyez-vous dans cet objet ? ». Questionna Guillaume
    « Bah ! Pas grand chose ! Hormis le fait qu´elle ne soit ni bleue ni rose mais grise et noire ! En y réfléchissant bien, elle me rappelle mon frère avec qui je suis en procès pour l´héritage de notre père. Elle est juste bonne à jeter à mon avis, cette bulle, elle est bien plus laide que le plus laid des objets que moi j´ai soufflé ! Elle me met tout simplement en colère cette chose ! Ne la gardons pas, jetons la dans le plus profond des gouffres que nous puissions l´oublier. » Aboya maître Anthelme des graviers dans la voix.
    « Et vous compagnon, que voyez-vous ? » Demanda vivement Arsène à Guillaume pour tenter de faire passer inaperçu la méchanceté des propos de son confrère.
    « Pour moi ce n´est pas plus facile que pour vous mes amis. D´ailleurs, moi je la vois tantôt rouge, tantôt verte, tantôt dorée et argentée ! » Répondit le souffleur l´air dubitatif. Après avoir réfléchi quelques minutes il ajouta.
    « J´y sens ce que vous y sentez Arsène, et j´y retrouve que ce que vous y retrouvez Benoît. J´y vois le regard d´une mère, la beauté d´un enfant, mais j´y entends aussi des éclats de rires, je sens la chaleur d´une flamme quand j´approche ma main. Elle me fait aussi penser à un frère, maître Anthelme, mais vous le savez, je n´en ai point… Et, du coup, elle me donne envie de faire du moindre inconnu qui passe ce frère que je n´ai pas ! Elle me donne envie de partager. Tiens ! je sais maintenant ce que nous allons en faire! dit-il d´un ton joyeux. » Puis, se tournant vers le petit Pierre il rajouta.
    « Si tu es d´accord mon garçon nous allons l´offrir à tout le monde. »
    Pierre avait écouté les propos de ses maîtres partagé entre la joie et l´incrédulité. Il était transporté de bonheur et de fierté. Durant toute la conversation, les yeux rivés sur sa bulle, il avait ressentit tout ce que les autres ressentaient ! Comment cette petite chose qu´il avait crée pouvait-elle avoir autant de puissance ? Il ne savait pas, mais en tout cas, il voulait qu´elle vive ! Il avait envie de sauter au cou de maître Guillaume, aussi répondit-il précipitamment :
    « ho ! oui maître ! Offrons la à tout le monde. »
    Alors, Guillaume, avec un sourire, saisit la boule, enroula un fil doré tout autour de sa surface en prenant garde de laisser le plus de verre possible apparaître, puis se dirigea vers le sapin de Noël qui finissait de perdre ses aiguilles dans un coin de l´atelier et suspendit la bulle de verre à la plus haute des branches.
    Dés qu´elle fut posée, la bulle de verre se balança, doucement, comme bercée par un souffle de vent. Elle emprisonna toutes les couleurs qui l´entouraient, elle vola le bleu de l’acier, elle captura les reflets du feu des forge, puis, d´un coup, fit exploser la vie en une gerbe de lumière.
    C´était féerique, mes amis.
    Jamais homme ne vit spectacle plus beau ! Tous les ouvriers de la soufflerie, attirés par cette magie, se tenaient serrés les uns aux autres, émus, autour du sapin. Ils se sentaient unis dans la beauté. Et sur nombre de visages burinés coulaient de grosses larmes de joie.

    Maître Guillaume passa son bras autour des épaules de Pierre et lui dit avec un bon et grand sourire :
    « Tu vois, mon garçon, tu l´as réussi ton chef d´œuvre! Tu as offert un peu de toi aux autres et ce que tu donnais te paraissait bien peu et bien inutile. Regarde maintenant ! Ne penses-tu pas que la moindre chose offerte avec sincérité et amour est le plus beau des cadeaux ?
    - Ho si ! » Dit le petit garçon heureux.
    « Tu seras un grand maître verrier un jour ! » Conclu Guillaume avec fierté.
    « Merci maître » Répondit le petit garçon, en essuyant ses joues mouillées…

    Et, depuis, à travers le monde, pour la nuit de Noël, on suspend aux branches des sapins de jolies petites boules multicolores. Est-ce pour que cela soit plus joli ? Est-ce pour rendre nos maisons plus agréables ? Ou est-ce uniquement pour retrouver le regard aimant d´une mère, la douceur de notre enfance, la joie sur le visage de nos amis, le bonheur de partager un moment d´amour. Qui sait mes amis ? Qui sait ?
    En tout cas, souvenez-vous du petit Pierre qui offrit un peu de lui au monde…Ne vous demandez pas à quoi sert ce que vous donnez, on ne sait jamais ce que les autres vont en faire et peu importe! Le principal est de donner avec amour et sincérité…

    Que votre Noël soit plein d´amour, de joie, de partage et que le bonheur pousse sur vos arbres !

    Amis, passants, absents...Je vous embrasse

    Aéllo qui raconte
    • Created on Dec 8, 2003 at 8:54 AM
    • #17729
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  • meregrand

    614 messages

    France

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    • Created on Dec 8, 2003 at 12:07 PM
    • #17736
    Bonjour Mèregrand,

    :p Je te remercie...tu es très gentil.

    Mais ne dis pas de gros mots s´il te plaît..."Raisonnable" brbrbrbrrrr ! ;)

    Bises.

    Aéllo qui ne veut pas être raisonnable, jamais.


    ...j'ai employé ce mot pour rester......,mais ce n'est pas vraiment celui auquel je pensais!....mais alors pas du tout,du tout,du touuuuut !!! :no: A bientôt-
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    Canada

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    • Created on Dec 8, 2003 at 8:25 AM
    • #17725
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  • miwag

    7293 messages

    France

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    • Created on Dec 8, 2003 at 12:07 PM
    • #17736
    Bonsoir
    Quite à affronter l'ire terrifiante de notre chère Aello - j'en ai des frissons rien qu'à l'idée, mais mon coté maso m'y pousse aveuglément -je lui dirai ceci: être raisonnable ne veut pas forcément dire obéir à des considérations morales antinomiques au concept même de liberté- mais tout simplement être capable de penser et de réfléchir avant de faire quoique ce soit; savoir faire fonctionner son cerveau au lieu de le laisser glisser vers une dégénérescence voulue par les ayatollahs du libéralisme où il n'y a de bon citoyen que là où il a bon consommateur bien ouvert , à la mode au loisir à tout prix, totalement esclave de ses pulsions et de ses envies soigneusement entretenues par la pub... non mais des fois!!! :angryfire:
    ;) ;) :D :D :beer: :beer:
  • miwag

    7293 messages

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    Bonsoir
    Quite à affronter l'ire terrifiante de notre chère Aello - j'en ai des frissons rien qu'à l'idée, mais mon coté maso m'y pousse aveuglément -je lui dirai ceci: être raisonnable ne veut pas forcément dire obéir à des considérations morales antinomiques au concept même de liberté- mais tout simplement être capable de penser et de réfléchir avant de faire quoique ce soit; savoir faire fonctionner son cerveau au lieu de le laisser glisser vers une dégénérescence voulue par les ayatollahs du libéralisme où il n'y a de bon citoyen que là où il a bon consommateur bien ouvert , à la mode au loisir à tout prix, totalement esclave de ses pulsions et de ses envies soigneusement entretenues par la pub... non mais des fois!!! :angryfire:
    ;) ;) :D :D :beer: :beer:
    • Created on Dec 8, 2003 at 2:28 PM
    • #17747
    Bonsoir
    Quite à affronter l´ire terrifiante de notre chère Aello - j´en ai des frissons rien qu´à l´idée, mais mon coté maso m´y pousse aveuglément -je lui dirai ceci: être raisonnable ne veut pas forcément dire obéir à des considérations morales antinomiques au concept même de liberté- mais tout simplement être capable de penser et de réfléchir avant de faire quoique ce soit; savoir faire fonctionner son cerveau au lieu de le laisser glisser vers une dégénérescence voulue par les ayatollahs du libéralisme où il n´y a de bon citoyen que là où il a bon consommateur bien ouvert , à la mode au loisir à tout prix, totalement esclave de ses pulsions et de ses envies soigneusement entretenues par la pub... non mais des fois!!! :angryfire:
    ;) ;) :D :D :beer: :beer:


    Ceci dit j'ai adoré cette histoire qui me rappelle qu'enfant élevé dans la tradition parpaillote, j'ai eu droit chaque année à d'immenses sapins de Noël avec des boules grosses comme des ballons de handball qu'on devait manipuler avec un soin particulier pour éviter des incidents qui auraient pu avoir d'aussi facheuses conséquences que lorsque une bougie venait en s'inclinant enflammer une branche: j'ai toujours vu à cette époque des extincteurs en action toujours posés à quelques mètres de l'arbre... amicales salutations à tous Michel W.
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    • Created on Dec 8, 2003 at 8:25 AM
    • #17725
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    • Created on Dec 8, 2003 at 5:25 PM
    • #17768
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    • Created on Dec 8, 2003 at 5:28 PM
    • #17769
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    • Created on Dec 8, 2003 at 5:32 PM
    • #17770
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    • Created on Dec 9, 2003 at 10:09 AM
    • #17794
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  • sourire613

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    • Created on Dec 9, 2003 at 10:23 AM
    • #17795
    pour notre Aéllo. Subjugué et charmé par ce très beau conte.
    Alors les zazous, les aminches et les gazelles, qui ose relever le défi ?
  • meregrand

    614 messages

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    • Created on Dec 9, 2003 at 10:09 AM
    • #17794
    Bonjour mes zazous,

    Mèregrand,

    J´en étais sûre ! le mot auquel tu pensais ne POUVAIS pas être "raisonnable" ! ;)
    Ne pensais tu pas "nous serions un peu moins cons" ? Allez...on va transiger et mettre un peu plus "Sage"... ça te vas ?


    :no: après.. :dunno: je préfère la première formule qui correspond exactement -à la lettre près- à ce que j'avais écrit dans un premier jet.. ;)
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    • Created on Dec 9, 2003 at 10:09 AM
    • #17794
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    pour notre Aéllo. Subjugué et charmé par ce très beau conte.
    Alors les zazous, les aminches et les gazelles, qui ose relever le défi ?
    • Created on Dec 9, 2003 at 2:08 PM
    • #17804
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    • Created on Dec 9, 2003 at 7:59 PM
    • #17812
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