«La Merique Françoise»

Bonjour à tous,

Le titre de l’article vous étonne ? Evidement, vous pensez à une faute de frappe grossière ? Et bien non, c’est exactement ce qui a été gravé sur le revers de la pièce présentée aujourd’hui :

DOVBLE . DE. LA . MERIQVE . FRANCOISE

Le double de l'Amérique Françoise 1670 A, d'après l'ouvrage Monnaies coloniales Françaises de Gadoury & Cousinié (1980), n'est connu qu'en un seul exemplaire !
Mais que sait-on vraiment sur l’une des premières pièces de monnaie d’usage en « Nouvelle-France » soit les terres du futur Canada ?

En 1670, la France décide d’émettre des pièces pour ses colonies en Amérique. Avant ça, le pays n’avait jamais émis de pièces de monnaie pour ses colonies, et les colons de l’Amérique du Nord utilisaient ce qu’ils pouvaient se mettre sous la main (même des cartes à jouer), peu importe le pays d’origine de la pièce.
L’édit du roi Louis XIV du 19 février 1670 autorisa la frappe de 2 400 000 pièces de 2 deniers tournois.
Le 24 mars 1670, par ordre de Conseil, il fut permis de fondre des vieux deniers et doubles tournois par l’atelier de Nantes, ceci afin de remédier à la difficulté d’obtenir le cuivre nécessaire à cette frappe. Malgré cet ordre, les deux millions ½ de pièces ne furent jamais fabriquées. Jusqu’à présent un seul exemplaire est connu, cuivre 22 mm, poids 3,826 gr.
Cet original unique doit être considéré « Hors cote ».

En 1894, Mr Breton, éminent numismate, mentionne deux exemplaires : le spécimen du Comte de Ferrari et un autre qu'il dit se trouver dans la collection de M.Ulex à Hambourg. Cependant, ce deuxième spécimen n'a jamais été retrouvé et sa provenance n'a jamais été confirmée ailleurs jusqu'à présent. Actuellement, seul le spécimen Ferrari est connu.
Ferrari, de son vrai nom « Philippe de La Renotière von Ferrary » était un célèbre collectionneur de timbres-poste, mais il possédait aussi une importante collection de monnaies anciennes. A sa mort en 1917, sa collection reste entre les mains des autorités françaises jusqu'à sa dispersion entre 1921 et 1926, par 14 ventes aux enchères, en paiement des dommages de guerre dus par l'Allemagne et l'Autriche à la France. Le produit de ces enchères sera de plus de 30 millions de francs de l'époque. Sa collection de monnaies sera dispersée chez Sotheby, Wilkinson & Hodge à Londres, durant une vente qui dura 5 jours en 1922. Si la pièce présentée aujourd’hui existe toujours, impossible de savoir ce qu’elle est devenue… un jour peut-être ?
Un lien à suivre pour connaître le dernier propriétaire connu : Link (https)

Bonne lecture et à bientôt.
Pierre

Bonjour Pierre,

Très intéressant, merci.
Appremment la trace de cette monnaie est perdue depuis la vente de 1922, comment peut-on dès lors en avoir une photo en couleurs qui ne semble pas avoir été colorisée ?

Bonjour Guillaume,
Evidement j'attendais cette question, nous avons eu la même réaction, c'est parfait.
Ce double de l'Amérique Françoise présenté, est une copie moderne refabriquée. Elle est formée de deux clichés soudés en étain bronzé. Commercialisée et vendue par la société iNumis Link (https)
Je me suis contenté de copier leur photos pour illustrer le sujet.
Toutefois cette pièce était déjà photographiée sur le livre de Gadoury & Cousinié en 1980.
Et quand Mr Breton l'a vu en 1894, le matériel photographique de l'époque ne permettait certainement pas un cliché d'une telle précision.
Alors, il ne nous reste plus qu'à enquêter pour comprendre.
Je ne pense pas qu'elle soit au Cabinet des médailles de la BN à Paris ?
Elle n'est pas non plus à la Monnaie royale du Canada de Ottawa ?
Mais où est-elle ? ? ?

Bonne journée !

Merci. Probablement un moulage réalisé sur l'original, donc il y a bien longtemps...
L'original doit être en collection privée, espérons que ladite collection n'a pas été écrasée sous les bombes en 44, comme tant d'autres.
En 1670 le différent d'atelier A désignait déjà Paris, je suppose donc que Nantes n'a fait que la fonte et peut-être la réalisation des flans ?

Bonjour pier2,
après la lecture de votre fascinante présentation de DOUBLE DE LAMERIQUE FRANCOISE, je me suis précipité pour vérifier mes pièces canadiennes de la Nouvelle-France. Malheureusement, je l'ai évidemment pas trouvé comme il fallait s'y attendre.
Merci aussi pour ce monsieur Ferrant qui a eu une vie très originale. Ce qui m'intrigue beaucoup, c'est qu'il aurait été adopté par un comte autrichien, à la demande de son père et après la mort de celui-ci. Selon les informations disponibles, Ferrant aurait eu 26 ans lors de son adoption. C'était un grand enfant. J'aimerais en connaître plus à ce sujet si possible.
Merci pier2 pour vos présentations toujours pertinentes et fouillées. Si Delcampe ne me fournissait que cela, cela vaudrait plus que j'en aurais jamais attendu.
grossebete. Gilles

Bonjour et merci Gilles,
On reconnait bien là le "Collectionneur" qui est en vous : « je me suis précipité pour vérifier mes pièces »
Merci pour votre enthousiasme.
Je ne ferai certainement pas de recherches sur le personnage et je ne pourrai certainement vous aider pour en savoir plus. C'est une petite étude historique à mener par un passionné. Moi je reste focalisé sur sa collection de monnaies dispersée, et c'est déjà beaucoup.

A bientôt.
Pierre