Manuel Valls repart de Nouvelle-Calédonie sans accord politique Par Tristan Quinault-Maupoil envoyé spécial à Nouméa (Nouvelle-Calédonie) Il y a 3 jours Sujets Manuel Valls Nouvelle Calédonie Manuel Valls, ministre des Outre-mer. Manuel Valls, ministre des Outre-mer. DELPHINE MAYEUR / Hans Lucas via / Hans Lucas via AFP Le ministre des Outre-mer a défendu «une souveraineté avec la France», rejetée par les loyalistes. Manuel Valls a quitté la Nouvelle-Calédonie ce jeudi après-midi, après avoir « constaté avec franchise qu’aucun accord n’a été conclu » avec les forces politiques locales. La tâche du ministre des Outre-mer, présent depuis dix jours sur place, était ardue. Il s’agissait de trouver un nouveau cadre institutionnel pour la Nouvelle-Calédonie, vingt-sept ans jour pour jour après la signature des accords de Nouméa sous l’égide de Lionel Jospin. Les trois référendums d’autodétermination ont rejeté l’indépendance du territoire, réclamée par les Kanaks. Lesquels ont boycotté la dernière consultation, en 2021. Depuis, la situation s’est enlisée au point d’aboutir au retour de la violence l’année dernière : quinze personnes sont mortes et l’économie locale est à l’arrêt, après des dégâts estimés à plus de 2 milliards d’euros. À découvrir PODCAST - Écoutez le club Le Figaro Politique avec Yves Thréard PODCAST - Écoutez le club Le Figaro Politique avec Yves Thréard Pour sortir de l’impasse, Manuel Valls a proposé un projet de « souveraineté avec la France » pour les 270 000 habitants de l’archipel. Il consistait à transférer des compétences régaliennes (défense, sécurité, monnaie, justice) aux autorités locales, et de permettre ensuite à la France de les exercer via une « délégation immédiate ». Une double nationalité aurait été permise et l’établissement d’un statut international instauré. Des options discutées depuis lundi lors d’un conclave de deux jours et demi à Bourail, dans un hôtel situé au bord du lagon classé au Patrimoine mondial de l’Unesco. En amont de ce rendez-vous, le ministre d’État avait réaffirmé sa volonté « d’achever la décolonisation de la Nouvelle-Calédonie ». À lire aussi De Paris à Nouméa, un front loyaliste s’organise pour prendre Valls de court Le camp loyaliste s’est senti trahi et en a appelé directement à Emmanuel Macron. Figure des opposants à l’indépendance, la présidente de la province Sud, Sonia Backès, lui a reproché de présenter un projet qui « porte atteinte à l’intégrité de la République française et à la démocratie ». « C’est une déception de ne pas aboutir à un accord parce que la Nouvelle-Calédonie se relèverait mieux s’il y en avait un », a-t-elle déploré au Figaro. Si l’entourage de Manuel Valls a évoqué des échanges « intenses » mais « respectueux », des moments plus tendus ont rythmé la négociation, qui a pris fin mercredi vers 22 heures. «Le sol se dérobe sous leurs pieds» L’ancien premier ministre a pu être tenté de vouloir avancer sans cette frange de l’échiquier politique, qu’il considère comme radicalisée. Tout en imaginant que les loyalistes accepteraient plus facilement un accord par peur de se trouver électoralement marginalisés. Après la dissolution de l’Assemblée nationale l’été dernier, Emmanuel Tjibaou, fils du leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou, a fait basculer la 2e circonscription. Tandis que Marine Le Pen a changé de pied après les émeutes en prônant « un référendum de plus ». « Le sol se dérobe sous leurs pieds », analysait un observateur. Mais, loin de les rendre plus conciliants, les anti-indépendance ont joué le rapport de force avec Manuel Valls. « En ne respectant pas le choix des Calédoniens, en ne respectant pas la démocratie en Nouvelle-Calédonie, en cédant à la violence, il a fait échouer la possibilité d’un accord », a chargé le député Nicolas Metzdorf (Renaissance). Le projet du ministre « était un projet d’indépendance. Nous assumons pleinement de l’avoir refusé », a revendiqué Virginie Ruffenach (Rassemblement-Les Républicains). Ils ont pu s’appuyer, à Paris, sur le soutien de plusieurs ministres, de Sébastien Lecornu (Armées) à Bruno Retailleau (Intérieur) et Gérald Darmanin (Justice). Tandis que l’Élysée s’est montré très attentif à leurs craintes. « J’étais très concentré en Nouvelle-Calédonie sur ma tâche. Il faut garder une certaine hauteur de vue et voir loin », a balayé Manuel Valls, à l’évocation de ce « bruit » venu de l’Hexagone. Ancrée dans la Constitution française, notre proposition permettait de garder un lien structurel, solide et pérenne entre la France et la Nouvelle-Calédonie Manuel Valls, ministre des Outre-mer « Ancrée dans la Constitution française, notre proposition permettait de garder un lien structurel, solide et pérenne entre la France et la Nouvelle-Calédonie », s’est défendu l’ancien premier ministre lors d’une conférence de presse organisée au haut-commissariat de la République à Nouméa. Persuadé que sa proposition n’est pas morte, il a écarté le contre-projet de la droite locale en faveur d’une différenciation et d’un renforcement des provinces, selon qu’elles sont indépendantistes (le Nord et les îles Loyauté) ou loyalistes (le Sud). Cela « mettait en cause, à nos yeux, l’unité et l’indivisibilité de la Nouvelle-Calédonie - protégées par l’accord de Nouméa et notre Constitution - à travers un projet de partition de fait », a-t-il dit. « Une souplesse institutionnelle, un grand fédéralisme », préfère défendre Virginie Ruffenach en actant l’existence de « modes de société différents ». Un problème politique et identitaire Une façon d’acter, aussi