Le thaler de Marie Thérèse

  • pier2

    15038 messages

    France

    Bonjour,

    Un sujet d’étude numismatique sans fin, dont on pourrait écrire un roman. Rassurez-vous, je ne vais vous rappeler que les grandes étapes de cette longue histoire.
    Marie Thérèse (1717-1780) Archiduchesse d'Autriche, reine de Hongrie et de Bohème, épouse de l'empereur François-Étienne de Lorraine.
    La « Maria Theresia Taler » de 1780 est probablement la pièce de monnaie la plus célèbre et la plus connue au monde :

    - 1ère image : Les premiers thalers avec le portrait de Marie-Thérèse ont été frappés en 1741, buste jeune de Marie Thérèse et au revers un blason couronné et deux têtes de griffons en haut entourent la couronne. Une pièce d’argent de 43,5 mm pesant 28,82 g.

    - 2ème image : De 1764 à 1765, Le buste au physique plus affirmé de Marie Thérèse et au revers l’aigle impérial bicéphale couronné et les armoiries composées au centre. Pièce d’argent 41 mm d’un poids de 28,06 g.

    - 3ème image : À partir de 1765, après la mort de son mari, le thaler fut frappé jusqu’en 1772 d'un voile de veuve. Le revers et les caractéristiques dimensionnelles sont restés inchangés.

    - 4ème image : Après la mort de Marie-Thérèse, le thaler de 1780 a continué à être frappé, jusqu'en 2022. On prétend trop souvent que ce Taler a été refrappé avec un design inchangé. Malheureusement, cette affirmation conduit de nombreux collectionneurs à croire que les pièces présentant des signes d'utilisation sont de possibles originaux.

    En Autriche, le thaler a eu cours légal jusqu'au 31 octobre 1858. Jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le thaler était un moyen de paiement reconnu dans une grande partie de l'Afrique. L'aire de répartition s'étendait de l'ouest de l'Afrique du Nord en passant par le Soudan, l'Éthiopie, la Somalie et le Kenya jusqu'aux zones côtières de la Tanzanie, de toute la région asiatique-islamique jusqu'à certaines parties de l'Inde. Au total, il existe entre 100 et 150 variantes clairement identifiables, mais aussi d'innombrables variantes. Collectionneurs, soyez vigilants !

    Bonne journée et vous savez que vos éventuels compléments d'informations sont toujours très appréciés
    Pierre
  • Guillaume_Hermann

    722 messages

    France

    Bonjour,

    En effet le thaler de Marie-Thérèse daté 1780 est dans l'immense majorité des cas notre contemporain... et pas nécessairement en argent : j'en ai sorti un, le mois dernier, qui ne contient aucune trace d'argent et est vraisemblablement en inox. Dans ce cas, on est évidemment plus proche de la truanderie que de la refrappe.
    Et pour l'aspect culturel, signalons que le thaler (pas nécessairement celui de Marie-Thérèse, mais le type de monnaie nommé "Thaler", qui remonte au XVIe siècle et a connu une multitude d'émetteurs) est à l'origine du mot "dollar" et de nombreux autres dérivés comme le tolar de Slovénie, le daler de Suède... "Thaler" étant l'aphérèse de "Joachimsthaler", qui signifie "de Joachimsthal", parce que les premiers thalers furent frappés avec l'argent extrait de la mine de Sankt-Joachimsthal ("vallée de Saint-Joachim").

    C'est ainsi un des types monétaires à riche descendance étymologique, avec le follis et, dans une moindre mesure, le solidus. Le solidus, monnaie romaine, a évidemment donné le sol et le sou. Le follis, création romaine du début du IVe siècle, a connu un destin plus riche et plus voyageur. Le follis est créé à Rome. Peu après, l'empire devient pour ainsi dire double, avec Constantinople : le système monétaire est commun et le follis est donc en usage à Constantinople également. L'empire romain d'Occident s'effondre et le follis disparaît en Occident, mais Byzance se maintient jusqu'au quasi-milieu du IIe millénaire et le follis aussi. Les musulmans qui entourent Byzance et finiront par la prendre s'inspirent du follis et cela donne le fals, falus, fulus, fils... Nombreuses transcriptions de ces sonorités arabisées. Certaines de ces unités sont encore en usage près de 2000 ans plus tard, comme le fils irakien.
    Les Ottomans qui ont pris Byzance envahissent l'Afrique du nord, et y diffusent leur système monétaire, donc notamment le fals. Quand les premiers soldats français débarquent en Algérie en 1830, ils intégrent le fals à l'argot militaire et importent ensuite cet argot en métropole, où il passe aux civils : c'est le "flouze" ! Déformation de "fulus".
    De la Rome antique aux titis parisiens en passant par la Turquie ottomane et l'Algérie, à travers près de 2000 ans...
  • pier2

    15038 messages

    France

    Bonjour et merci Guillaume,
    Voici un superbe complément d'informations.
    J'apprécie beaucoup. :cool2:

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