Etat
: legere usure et oxydation au revers
En savoir plus sur les Monnaies Satiriques
Napoléon III l'avait secrètement voulue cette guerre ! Il avait
besoin de retrouver la confiance des Français, et n'avait jamais
vraiment pu instaurer son autorité. Son amour-propre souffrait de
la constante défiance de son peuple. Les conseils incompétents de
son environnement militaire, l'incroyable suffisance et la
confiance irraisonnée de son entourage (Le général Leboeuf se
disait prêt jusqu'au dernier bouton de guêtre), le conduiront à une
déclaration de guerre le 19 Juillet 1870.
Bismark de son coté l'espérait aussi cette guerre, elle devait lui
permettre de consacrer l'unification Allemande, sous l'hégémonie de
la Prusse.
Six semaines de campagnes désastreuses suffiront à conduire
Napoléon III à capituler, le 2 septembre 1870. Il est fait
prisonnier avec 83.000 de ses hommes. C'est la défaite de Sedan
!
Le 4 septembre, Paris qui est mis au courant de ce désastre,
déchoit l'empereur et proclame la République. Mais les allemands
investissent la France, ils arrivent à Paris le 19 septembre, et
c'est une France épuisée, humiliée et bafouée qui capitulera le 28
janvier 1871.
La paix est signée le 10 mai 1871 à Francfort, la France perdra
l'Alsace et la Lorraine, et devra verser en dommage de guerre la
somme de cinq milliards de francs or !
ALORS…extraire de sa poche une pièce de monnaie à l'effigie
de cet empereur que l'on détestait vous donnait des idées…
Cet épisode de l'histoire ne pouvait qu'entraîner une explosion de
cette haine qui se manifestera entre autre par la mutilation de ces
pièces de monnaies, puis par la frappe et l'émission de jetons et
de médailles satiriques. Par l'intermédiaire de la satire de
l'empereur haï, c'est le petit peuple de France qui relève la tête
et lave son humiliation
sous Napoléon III...
On peut définir une monnaies satirique, comme un objet détourné de
sa fonction unique originelle : moyen de paiement, pour le
transformer en un support de propagande.
Des exemplaires de toutes les monnaies en cours, seront surchargées
" SEDAN ", surcharge qui balafrera le portrait de l'empereur. La
gravure sera faite à la main, lettre à lettre ou à l'aide d'un
poinçon. Des particuliers prendront l'initiative de regraver à la
main et une à une des pièces de monnaie, et avec plus ou moins de
talent Les portraits regravés, dans un premier temps souvent
grossiers, seront par la suite réalisés par des professionnels qui
s'appliqueront à créer un véritable petit chef-d'œuvre.
Napoléon se retrouvera ainsi coiffé d'un casque à pointe, d'un
shako, d'un uhlan, d'un bicorne ou autre coiffure militaire
prussienne. Toutes sortes de couvre-chefs suivront, ils affubleront
ce pauvre empereur, d'un pot de chambre, d'un bonnet de nuit, d'un
bonnet de nourrisson, etc.. L'aigle impériale du revers, deviendra
chouette. Chaînes et colliers de bagnard seront attachés au cou de
l'empereur prisonnier, qui pourra fumer une pipe ou une cigarette.
La légende : Empire Français sera fréquemment traduite par :
Vampire Français.
La majorité des pièces regravées le sera sur des modules de bronze
de 1, 2, 5 et 10 centimes. Les gravures sur les monnaies d'argent
de 20 et 50cts, et de 1, 2, et 5 francs sont beaucoup plus rares.
Très peu de monnaies d'or ont été mutilées. Sur le module de 5
francs en argent, certaines tranches seront meulées puis regravées
avec pour légende : " DIEU PUNIRA LA FRANCE ", inscription
anti-royaliste qui s'est manifestée au moment de la restauration de
la monarchie, et que l'on rencontrera sur des écus de 5 francs de
Charles X et de Louis Philippe. Un écu de 5 francs en argent,
représentera Napoléon III revêtu de la calotte et des habits
pontificaux, probablement à la suite de sa protestation auprès de
Victor-Emmanuel II, au sujet de la spoliation des biens de
l'église. Quant à l' identité de ces " retoucheurs " de monnaie,
elle reste incertaine : des Français par haine de l'empereur, des
Allemands pour en faire un outil de propagande, et des soldats
Français, prisonniers, qui exprimaient leur amertume.
Mais cette production artisanale ne suffira pas à assouvir le désir
de vengeance de l'opinion publique. Il fallait alors multiplier les
messages de dénigrement transmis par ces pièces. On fera appel à
l'industrie qui frappera une grande quantité de médailles et de
jetons. Frapper des pièces aurait été passible de condamnation pour
faux-monnayage. On utilisera alors différents matériaux : le
cuivre, le laiton, le bronze, le fer, l'étain, le maillechort, le
zinc etc… Jetons et médailles laissaient une totale liberté
de création au graveur, autant pour le portrait que pour la
légende. Médailles et médaillettes peuvent se rencontrer sur des
modules de diamètres et épaisseurs différents, éventuellement
percées, pour être portées en pendentif avec ou sans belière.
Toutes ces légendes encerclant le portrait de l'empereur en disent
long sur l'opinion et l'état d'esprit de nos compatriotes, après
cette reddition jugée précipitée, lâche et humiliante, faisant elle
même suite à une déclaration de guerre controversée. On pourra en
effet lire: “Napoléon le misérable”, “Napoléon le
lâche”, “le boureau des Français”,
“Napoléon le petit”, “honte et infamie”,
“vampire de la France”, “parjure et
traître” etc...
Les graveurs de jetons sont restés aussi anonymes que les
particuliers, cependant le nom d'un graveur professionnel de ROUEN
revient régulièrement : le père RICHER, ennemi farouche des
prussiens.
...et les autres
C'est aussi sur ces mêmes 5 et 10 centimes en bronze de Napoléon
III qu'on retrouvera le profil du célèbre général Boulanger.
Militaire à la carrière prestigieuse, ses campagnes et ses
blessures en feront, au lendemain du désastre de Sedan, le symbole
de la France victorieuse, et le porteur des espoirs de revanche.
Ministre de la guerre en 1886 sa popularité ne cessera de croître.
Plébiscité par le peuple, il cumulera les provocations contre
l'Allemagne. Ses amis le poussent à prendre l'Elysée, mais il
refusera et perdra alors d'un coup le soutien de ses partisans, et
il verra ses adversaires s'acharner à sa perte. Il devra s'enfuir
pour la Belgique, où il se suicidera sur la tombe de sa
maîtresse.