LA LÉGENDE DES REPAS
De la cuisine de jadis, préparée par les femmes, au feu de bois — chaleur douce, pénétrante, présences tutélaires, la « cuisine du coeur » — à la haute gastronomie, un peu froide, esthétique, élaborée par ces Messieurs les virtuoses. Du repas solitaire — au restaurant, sur un chantier, dans un parc, la nuit quand on se relève — aux repas de l'enfance, en famille, heureux ou tournant à la tempête. Repas du dimanche, paisible, à « l'Auberge du Bel Eté ». Ou triste réfectoire gériatrique. Cela dit, la table est l'autel où sont sacrifiées les bêtes pour le fin plaisir des convives. C'est comme un voyage, ici, du meurtre (des bêtes) à la communion des chers humains... Mais il y a aussi ce repas, la Cène, la veille du vendredi de la mort (« Prenez et mangez, ceci est mon corps »). Et repas encore, à Emmaüs, le soir même du dimanche de Pâques. Repas à Paris. En province. Petits restaurants populaires. Dîners d'apparat. Sandwiches ou grands menus. Repas en Toscane, en Calabre ; dans les Franches-Montagnes ; en Grèce, en Crète. Où il semble qu'à table, sous le signe des pois chiches, de l'huile d'olive, des souvlakis, de la retsina, c'est la terre elle-même et la mer et le ciel, la lumière et la vie qu'on absorbe. Cosmique est l'acte de manger ! Haldas dit tout cela. Et bien d'autres choses encore : le wagon-restaurant (rêveur), l'avion (désopilant). Repas ratés et festins somptueux. Mais aussi l'amitié, indissociable de tout vrai repas (à l'inverse des « repas d'affaires »). Et il rappelle, en passant, que les mots saveur et savoir ont, en latin, la même origine : sapere. Quels horizons ! Bref, des repas comme manifestation, par excellence, de la condition humaine. Telle est cette Légende. Où le quotidien, le burlesque et le sacré, de par la seule manière de l'auteur — sa voix — ne font qu'un.
REF DERFAU
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